Queen Mary 2
En ce jour anniversaire de la tragédie du 15 novembre 2003
Rappelons nous à la mémoire des victimes
***
Au port de Saint Nazaire
« Queen Mary 2 » sur cale sèche attend…
Ce n'est plus un bateau, c'est déjà Léviathan !
En ce temps du rosaire
Son cœur résonne encor des accords des soudeurs
Qu'à peine nouveau-né il se veut commandeur.
Aux portes de l'estuaire
Le vaisseau immobile au lourd ventre d'acier
Repu, semble dormir et se laisse apprécier.
Ne dirait-on revoir, renfloué des enfers
L'orgueilleux Titanic ?
Sorti des profondeurs, la blanche Moby Dick
Par Achab mise aux fers ?
En cet après midi sous un ciel grisaille
Venus voir Gulliver, les joyeux Nazairiens
Autour de lui pullulent , tels lilliputiens :
Léa, Yves, Charlène, avec tous leurs amis
Pour se récompenser, leurs services accomplis,
Depuis l’embarcadère, en caravansérail
Sont venu l’admirer et fêter ses adieux,
Avant qu’il ne s’en aille
Voguer sous d’autres cieux...
A l'homme trop souvent se prenant pour un Dieu
Poséidon exige un holocauste odieux :
- "A ce baptême offert,
Pour prix de cet orgueil, devoir mêler il faut
Au champagne le sang, à la gerbe la faux ! "
C’était l'heure du calvaire, quand, à trois heures et demie
Quarante cinq d’entr’eux depuis la passerelle
En un instant, sont vus précipités tous à l’envi :
Hécatombe sans ailes, dans un gouffre d’enfer.
Seize d’entr’eux plongeant dans le Léthé,
Sont morts, l’espace d’un éclair !
Non seulement content d’avoir été servi,
Léviathan venait de se repaître de leurs vies !
Le port, drapé d'un catafalque sur les toits,
A pris le deuil : Ses grues ont la forme de croix.
L’orage les bénit. Ses vents thuriféraires
L’encensent sous la pluie...
Quand la Mer et la Mort ont même résonance
La feuille et le terreau sont sur même fréquence
Que l'orgueil et le suaire !
Au milieu de la nuit, de la cale aux martyrs,
Sur fond de Golgotha, on entendra gémir
La voix de Saint Nazaire :
- « Pourquoi devoir payer de cette atrocité
Ce tribu de Babel à mon droit de cité ? »